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Les Chevaliers d'Alexandrin
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Les Chevaliers d'Alexandrin
18 novembre 2007

thème : la courtisane

Noblesse oblige

Ce soir, Madame

la Duchesse

Offre une somptueuse réception ;

Seule est présente la noblesse

Roture et faquins restent l’exception.

Est invitée la marquise de Chaudefesse,

Une marquise aux yeux moqueurs

Qui épient la chaste jeune vicomtesse

En secret, Demoiselle de Déshonneur.

Les longues robes cirent les parquets

Rongés depuis plus de deux cents ans.

Qu’importent tous ces décolletés osés,

Les charmes sont morts avec le temps.

Pour décor, des meubles de tous les rois

Dont ces altesses ont oublié le numéro,

Au milieu de cet immense  fatras,

Ne règne que l’apparence du beau.

Noblesse oblige

A qui le temps fait la pige.

La lueur de ces nombreuses bougies

Dont ils ignorent même le nombre

N’éclaire toujours pas leur esprit

Depuis si longtemps allongé à l’ombre.

Le dernier héritier, le prochain mariage,

Ils effeuilleront les pages du Gotha,

Les traditions ne possèdent pas d’âge.

Aux murs s’étiolent des blasons blafards,

Orphelins de couleurs et de splendeur,

Ils se fanent sans gueules et sans fard

Aussi maculés que leur « honneur ».

Affublées de bribes d’armoiries,

Ces dames serrent leurs particules

Mais restent malgré tout en vie

Face aux sourires du ridicule.

Noblesse oblige,

Elles espèrent des prodiges.

Messeigneurs, en vaines discussions,

Tentent de retrouver un manège,

Ils planifient une nouvelle révolution

En chasse de nouveaux privilèges :

«  Ah ça marchera, on gagnera, »

« Toute la roture à la lanterne, »

« Ca marchera tant qu’on sera là »

« La fleur de lys n’est plus en berne ».

« Voici le temps qu’on en finisse »

« Ils comprendront qui on honore ; »

« Et très bientôt le blanc de lys »

« Tuera le triste assassin tricolore ». 

Ce soir ils dansent sur un menuet

Pour oublier que fut la carmagnole

Mais leurs pas s’estompent désormais,

Leurs rythmes tels leurs droits s’envolent.

Noblesse oblige

Qui plus rien ne dirige.

Et j’écoute d’une oreille amusée

Délirer Madame de Je ne Sais Quoi,

Assise dans son taudis lézardé

Où seul un feu daigne rester roi.

Noblesse oblige,

Sur ses malheurs elle s’afflige.

         Yann Brugenn

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Commentaires
R
moi aussi j'ai évidement vue le rapport courtisane,exprimé dans ces vers, et ne saurait que me rallier aux commentaires précédents, quelle belle prose!
L
car je pense que c'est ce sujet traité ici même. Mais je ne suis pas là pour parler poèsie, en fait, je voulais juste dire... Quel cours d'héraldique superbe ! ! ! En médiéviste passionnée je ne peux qu'être admirative, je n'ai jamais songée à mélanger ces deux arts... conclusion : magnifique.
T
N'en déplaise à Madame De Chaudefesse, cette publication du chevalier Breizie, dont l'excellence me renvoie à un texte du même style parodique et non moins interessant écrit par Don Diego, me montre que j'ai bien fait de ne m'y point frotter les particules, de peur d'un ravage ridicule.<br /> J'avais en effet projeté d'user de ce style pour exprimer le sujet La Courtisane...
D
quelle déchéance d'une noblesse jadis rayonnante !<br /> il ne lui reste plus que les yeux pour pleurer.<br /> le temps a fait son œuvre.<br /> <br /> Don Diego
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